Irak, Libye, Syrie : à chaque fois que les USA ont joué aux apprentis-sorciers, c’est l’obscurantisme qui gagne

On savait que l’Armée américaine ne s’essuyait jamais les rangers lorsque les Etats-Unis envahissaient un pays. Mais elle ne fait pas non plus le ménage après son départ. Comme en Libye, le chaos succède à la pax americana, ou plutôt OTANA. Après avoir accusé sans aucune preuve Saddam Hussein d’avoir participé aux attentats du 11 septembre 2001, de massacrer sa population et de détenir des armes de destructions massives, l’Irak est envahi en 2003 par une coalition qui prétend apporter la liberté dans ses bagages, mais aussi la destruction et l’horreur. Le pays maintenu artificiellement sous perfusion occidentale est aujourd’hui livré à lui-même et aux démons qui ont été réveillés.

Les populations irakiennes subissent aujourd’hui de plein fouet, la situation régionale découlant de la destruction de la Libye et de la tentative de subversion de la Syrie. Aidée par des tribus locales, elles-mêmes d’obédience sunnites, l’armée irakienne a lancé une offensive dans la province d’Anbar faisant partie du soi-disant «triangle sunnite» pour tenter d’en déloger des rebelles affiliés à Al Qaïda qui cherchent à prendre le contrôle de l’ouest de l’Irak et d’une partie de la Syrie pour y fonder un Etat islamique fondamentaliste.

Faute de moyens, ou en raison d’un redéploiement stratégique, Washington estime sa mission locale comme accomplie et n’envisage pas de renvoyer de  troupes combattantes, laissant depuis 2011 le terrain aux entreprises de sécurité privées qui y foisonnent. C’est ce qu’a déclaré le Secrétaire d’Etat américain, John Kerry, lors d’une visite en Israël, je cite : « C’est un combat qui appartient aux Irakiens (…) Nous n’envisageons pas de revenir ». Sauf cynisme assumé, il semble que la situation échappe complètement à l’administration américaine qui a toujours su jouer sur les antagonismes religieux et créer les conditions de violences confessionnelles entre chiites et sunnites, faisant ainsi des dizaines de milliers de morts et servant les intérêts atlantistes. Le conflit armé entre les forces gouvernementales et les insurgés a éclaté dans la ville de Ramadi et s’est étendu à Faloujah après que la police ait tenté de disperser des manifestants et causé la mort de 13 d’entre eux. Des appels à la « guerre sainte » – un djihad – ont été prononcés contre la monopolisation du pouvoir par la minorité chiite.

En Syrie la lutte d’extermination entre factions rebelles et fondamentalistes se poursuit. Eprouvés, les deux camps n’en finissent plus de régler leurs comptes et de tenter d’obtenir une légitimité des plus discutables sur le terrain pour avoir le droit de siéger aux négociations de Genève 2. Pendant ce temps-là, les massacres de dizaines d’otages  continuent. Mais l’armée nationale syrienne poursuit sa libération des zones occupées et annonce avoir détruit, plusieurs centres de commandement, 36 missiles téléguidés et plusieurs camions et véhicules chargés de munitions.

Ainsi va le monde pour les Etats-Unis et ses alliés les plus proches dans la région : les alliés sunnites en Syrie deviennent des ennemis en Irak et inversement pour les populations chiites. Une doctrine stratégique qui a déjà fait ses preuves lorsque le 23 juin 1941, au lendemain de l’invasion allemande du territoire soviétique, le président Truman a déclaré, je cite : «  Si nous voyons que l’Allemagne est en train de gagner, nous devrions aider la Russie et si la Russie est en train de gagner, nous devrions aider l’Allemagne. Nous devons leur donner l’occasion de s’entretuer autant que possible “. fin de citation. La Russie avec ses 20 millions de morts a retenu la leçon. Lors d’une réunion à Moscou, entre diplomates russes et une délégation de hauts responsables américains, dirigée par la sous-secrétaire d’État Wendy Sherman, le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré que l’insurrection, qui est soutenu par des étrangers, fournit une menace pour l’avenir de la Syrie et de la stabilité dans la région. Ce trouble jeu et cette politique américaine illustre parfaitement l’étonnante position occidentale qui perd chaque jour un peu plus en crédibilité sur la scène internationale. Si la nécessité morale impose d’aider les rebelles à renforcer leur position en vue des négociations qui auront prochainement lieu à Genève, pourquoi ne pas poursuivre ce raisonnement absurde et responsable du prolongement du martyr des populations civiles ? Washington et ses alliés ne devraient-ils pas selon leur propre politique aider les différents groupes armés Palestiniens à renforcer leur position afin de consolider leurs revendications, dans les négociations actuellement en cours, avec les Israéliens ? A moins que tout cela ne soit réglé d’avance.Tout dépend en général de la puissance du lobby qui hante les couloirs de Washington.