“Mémoires de l’Archipel” : une conférence entièrement consacrée aux Goulags, organisée par l’association France Oural

C’est sous ce titre que l’association France-Oural, a organisé vendredi 17 janvier, une conférence sur le Goulag, dans l’auditorium de l’INALCO (langues Orientales). Le public (quelque 150 personnes) a eu le privilège de découvrir un échantillon de photos du goulag, qui n’ont à ce jour jamais été exposées en France ou en Occident. Pour autant, plusieurs intervenants ont souligné que ces photos ne rendaient pas compte des horreurs du Goulag. Ce sont en effet le plus souvent des photos à usage interne ou de propagande, ce qui ne facilite pas le travail mémoriel qui n’est pas considéré comme une priorité en Russie actuellement. Elles sont néanmoins riches d’enseignement et « beaucoup reste à faire pour les « exploiter », comme l’a fait valoir l’une des intervenantes, Anne Brunswic.
Jamais, à ce jour, ces photos n’ont été exposées, en France ou ailleurs en Occident. Elles ne sont connues que localement en Russie et seulement de spécialistes ou de gens concernés. Nicolas Werth, historien du Goulag, présent à la conférence, a souligné l’indifférence de la plupart des gens et l’oubli des jeunes générations, de leur existence. Il a pu observer lui-même que les traces matérielles elles-mêmes disparaissent. Un travail de mémoire, serait pourtant bien utile, a souligné le modérateur de la réunion, Dimitri de Kochko, en expliquant le pourquoi de cette conférence, qui n’a rien à voir avec un goût morbide ni une volonté de nuire à la Russie. Au contraire. D’abord parce que la mémoire de tels événements, qui ont couté la vie à des millions de personnes, ne peut être sélective et un massacre ne peut en cacher un autre. Ensuite, parce qu’il existe aujourd’hui, pour des raisons économiques, morales et politiques explicables, des tentations de réhabilitation de Joseph Staline en Russie et dans une moindre mesure, ailleurs.
Les traces des camps disparaissent peu à peu lorsqu’elles ne sont pas sciemment effacées. Les témoins se font rares et l’accès aux uns et aux autres n’a été possible que bien des années après. La mémoire du Goulag est nécessaire aussi pour remettre des pendules à l’heure. Car dans la guerre de l’information actuelle, on voit fréquemment des gazettes occidentales accuser la « Russie de Poutine » d’être un « énorme Goulag ». De telles informations, mêlent l’ignorance crasse et la propagande à l’odieux, vis-à-vis de ceux qui sont morts au Goulag ou qui en sont sortis marqués à jamais. La Russie aujourd’hui n’a heureusement plus rien à voir avec l’URSS du Goulag, mais la connaissance et la mémoire de ce dernier permettrait à tout le monde de mieux en prendre conscience. La parution récente, en France, de plusieurs ouvrages consacrés à l’Archipel, justifiait la tenue d’une telle conférence à la veille et dans le cadre de la 5ème édition des Journées européennes du Livre russe et des Littératures russophones. Des journées qui se tiendront les 31 janvier et 1er février prochains à Paris, dans les locaux de la Mairie du Vème. A en juger par le public qui s’est déplacé et par le succès de la manifestation, ce choix parait justifié.