Russie : Les hydrocarbures sont la nouvelle arme de dissuasion et un nouvel outil de diplomatie

L’entreprise pétrolière russe Rosneft, vient d’être admise à un appel d’offre en Irak pour le gisement de Nasiryia, l’occasion pour Rosneft d’élargir son champ d’action et d’affirmer son statut central parmi les entreprises pétrolières américaines, européennes et chinoises. Il y a 20 ans personne n’aurait parié là-dessus, et pour cause ! La Russie possède aujourd’hui les plus grandes réserves de gaz de la planète, les deuxièmes réserves de charbon et les septièmes réserves de pétrole. Mais ces ressources ne furent pas toujours exploitées au mieux et faillirent devenir le monopole de quelques-uns pour leur fortune personnelle.

A la chute de l’URSS le président libéral, Boris Eltsine, souhaite une transition vers le capitalisme, la plus rapide possible. Il organise des sortes de « ventes privées » des entreprises russes, ou seuls ont accès les membres de l’ancienne nomenklatura.  Ces derniers font l’acquisition de pans entiers de l’économie russe pour une bouchée de pain. Certains historiens ont même parlé de « pillage post-soviétique » de l’économie russe. Ces « nouveaux riches », appelés communément « oligarques », se sont constitué ainsi des fortunes colossales. Tout change à partir des années 2000 avec l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, qui amorce la reprise en main du secteur énergétique russe par le Kremlin. Poutine passe un pacte avec les oligarques : il s’engage à ne pas remettre en cause l’origine de leur fortune, mais eux doivent investir leur argent dans l’économie russe et s’abstenir de toutes ambitions politiques.

Parallèlement, l’Etat russe crée deux géants capables de contrôler le secteur énergétique russe : Gazprom pour le gaz naturel, et Rosneft pour le pétrole. Cette politique des « champions nationaux » a permis au Kremlin de reprendre le contrôle de sa production énergétique.  La fusion de ces deux entreprises, qui fut un temps retardé, aura lieu tôt ou tard, Rosneft rachetant petit à petit des parts de Gazprom et élargissant ses activités au gaz et plus. Grâce à cette stratégie et à ses hydrocarbures, la Russie peut désormais étendre son influence.
Ces hydrocarbures sont devenus nécessaires au bon fonctionnement du monde moderne, où que l’on soit. Par exemple la dépendance des pays de l’Union Européenne au gaz russe, permet au Kremlin d’obtenir une certaine importance dans les relations et les négociations diplomatiques. En 2008 lors de la « guerre du gaz », opposant l’Ukraine à Gazprom, la Russie a montré sa volonté de retrouver un rôle majeur sur la scène internationale, même si il faut pour cela utiliser l’arme énergétique, c’est-à-dire couper les robinets. Les ressources énergétiques de la Russie ont permis à celle-ci de garder un certain contrôle sur les républiques gazières d’Asie centrale.
Profitant du contexte économique et des prix élevés de l’énergie sur les marchés mondiaux, le Kremlin a su conserver le contrôle de ses ressources énergiques et mettre la Russie sur les « bons rails ». Les performances réalisées dans le domaine des hydrocarbures, assurent la bonne santé de l’économie russe. On assiste également à la montée en puissance de la Russie sur la scène internationale. Cependant, elle a tout intérêt à résoudre deux problèmes majeurs dans le secteur énergétique. Premièrement, la recherche d’investisseurs, car la recherche de nouveaux gisements a un certain prix, 70 milliards rien que pour explorer les gisements de l’île de Yamal. Deuxièmement la diversification des voies d’acheminement et de la clientèle. En effet, afin de devenir autonome, les entreprises russes doivent s’émanciper du marché européen, d’où l’intérêt d’une entreprise comme Rosneft de s’implanter en Irak.
Après l’ère Eltsine qui avait failli sonner le glas de l’économie russe, la Russie, sous la direction de Vladimir Poutine, a su reconstruire et reprendre en main son économie, en profitant des énormes ressources naturelles de son territoire. N’en déplaise à Washington…