Strasbourg : le président de la Douma, Sergeï Narychkine, profite de sa visite pour recadrer l’APCE

Une délégation de parlementaires russes, conduite par le Président de la Douma, Serguey Narichkine, s’est rendue à Strasbourg pour participer à une réunion de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, et prendre part à plusieurs rencontres bilatérales concernant les relations entre la Russie et l’Union européenne. Cette visite, qui aurait du avoir lieu un an plus tôt, avait été repoussée par M. Narychkine lui-même, après l’adoption par cette assemblée, d’une résolution sur la situation en Russie, dans laquelle aucune des remarques russes n’avait été prises en compte. Un étrange parti pris contre Moscou qui a toujours rempli ses obligations.

Moscou propose donc aujourd’hui de passer d’un suivi des pays, à un suivi thématique de plusieurs États, sur un problème concret. Comme par exemple les conditions de détentions des prisonniers, le respect des minorités ou de la liberté d’expression. Les principales questions, soulevées par les représentants russes ont concerné l’arrêt des effusions de sang en Syrie, la situation de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie face à la Géorgie, l’annulation du suivi discriminatoire de la Russie par le Conseil de l’Europe, ainsi que la violation des droits de l’homme par les États-Unis, qui ont accédé aux données personnelles de citoyens de nombreux pays européens.

Pour la première fois depuis que la Russie est entrée dans cette organisation, il y a 17 ans, le président de la Douma d’État, Sergueï Narychkine, a fait un discours devant l’Assemblée, dans lequel il a stipulé que je cite : « la surveillance thématique offre la possibilité de considérer tous les pays du Conseil de l’Europe comme étant égaux en droits. Le suivi de pays, lui, est une forme de contrôle sur les États. Alors que, nous le savons bien, en période de crise, surtout ces derniers temps, de très nombreux droits, qu’ils soient politiques, civils ou sociaux, sont bafoués dans les pays démocratiques « classiques » fin de citation.

C’est du reste, une vérité devenue difficile à supporter pour les populations des pays concernés. La procédure de suivi, appliquée par l’APCE s’est en effet transformée, en un mécanisme servant à discriminer certains Etats membres du Conseil de l’Europe et à diviser les pays en deux catégories : les « purs » et les « impurs », c’est-à-dire ceux qui sont constamment critiqués et ceux qui ne le sont jamais.

Concernant le dossier syrien, les parlementaires russes ont remarqué que Strasbourg avait considérablement progressé sur cette question. Si auparavant, l’avis prévalait sur le fait qu’une révolution démocratique s’opérait en Syrie, aujourd’hui la situation a bien changé. Force est de constater qu’avec le gouvernement actuel, les sept communautés religieuses et ethniques vivaient en paix en Syrie. Alors qu’aujourd’hui les chrétiens, les Kurdes et les chiites sont tués pour leur simple appartenance religieuse, tandis que des synagogues, des mosquées et des églises sont détruites. Si les rebelles accédaient au pouvoir, la paix civile, religieuse et ethnique qui existait en Syrie jusqu’à présent, disparaîtrait. Les processus qui se déroulent en ce moment au Proche-Orient, présentent également, une grande menace pour l’Europe même. Les rebelles qui combattent actuellement en Syrie se déplaceront et exporteront ailleurs leurs combats. Il est donc extrêmement dangereux de soutenir ce genre de tendances. Et on comprend aujourd’hui que la Russie avait raison sur de nombreux points.

La délégation russe a également évoqué le problème de la violation des droits de l’homme, commise par les États-Unis qui ont accédé aux données personnelles de nombreux Européens. Un problème que les révélations d’Edouard Snowden n’ont fait que confirmer. Rappelons que récemment, des données sont apparues sur la transmission par l’Allemagne, la France, l’Italie, l’Espagne, les Pays-Bas, le Danemark et le Royaume-Uni à la NSA d’informations personnelles provenant d’appels téléphoniques et de l’activité Internet de leurs propres citoyens. Pour la délégation russe, c’est une violation grave des droits fondamentaux. Elle a déclaré vouloir réaliser une enquête et obtenir des réponses, sur le nombre de victimes et le volume d’informations dévoilées. Elle souhaite aussi déterminer sur la base de quels accords et de quels documents, tout cela a été effectué. Et surtout, trouver des solutions pour prévenir à l’avenir, ce genre d’incident.

Les principaux griefs formulés à l’encontre de Moscou, quant à eux, portent sur la loi sur les ONG bénéficiant d’un financement étranger et sur le texte interdisant la propagande de l’homosexualité auprès des mineurs. Mais aussi les jugements rendus contre l’opposant Alexeï Navalny, condamné pour détournement de fonds, et contre le juriste Sergueï Magnitski, mis en examen pour complicité d’évasion fiscale et décédé en détention provisoire dans une prison de Moscou. Mais il semble cependant que le principal point d’achoppement porte essentiellement sur la sempiternelle fausse accusation, de discrimination des minorités sexuelles. Visiblement peu au fait des réalités russes, et ne fondant leurs réflexions que sur des témoignages très engagés contre la Russie, les députés européens présents ont été invités par le Président de la Douma, à se rendre compte par eux-mêmes, dans les boîtes de nuits et les bars homosexuels en Russie, que les minorités sexuelles ne sont aucunement discriminées, que ce soit au travail, dans leurs études ou lors d’activités politiques et publiques, mais que l’on ne doit pas faire la propagande de telles relations auprès des enfants. Et Serguey Narichkine a ajouté, qu’en évoquant la loi interdisant la propagande des relations sexuelles non traditionnelles parmi les mineurs, bien des commentateurs omettaient sciemment, ou sans doute par hasard, de mentionner les mots « parmi les mineurs ». Ce faisant, ils dénaturent la teneur et les motifs de l’adoption de cette loi.

Bien qu’opposés dans de nombreux dossiers, la Russie fait chaque fois preuve de bonne volonté et favorise la concertation avec ses partenaires, comme l’a déclaré le secrétaire général du Conseil de l’Europe Thorbjorn Jagland qui s’est félicité de constater la coopération entre les Etats-Unis et la Fédération de Russie. Interrogé sur l’attitude du conseil, concernant la thèse du président Barack Obama selon laquelle « les Américains sont exceptionnels », ce dernier a répondu que, je cite : « les Etats-Unis ne font pas partie de notre organisation. Qui plus est, si les Américains décident d’adhérer au conseil, des problèmes ne manqueront pas de surgir. Ils ont la peine de mort, ce qui est inacceptable pour nous ». fin ce citation. Et d’ajouter qu’en cela, les Américains étaient effectivement exceptionnels.

Le président de la Douma d’Etat, se demandait dans une interview récente, précédant son voyage à Strasbourg, pourquoi les députés européens considèrent qu’ils sont habilités à dicter à un Etat souverain quelles mesures il doit adopter, quelles mesures il serait préférable d’annuler, et quelles normes de la législation en cours devraient être corrigées. La Russie, tout en préservant sa souveraineté, entend passer outre certaines attitudes partisanes à son égard et trouver un dénominateur commun avec ses homologues européens. Cependant ces derniers devraient modérer leur ferveur moralisatrice, s’ils désirent vraiment se débarrasser de leur attitude stérile à l’égard de la Russie et surtout s’ils veulent retrouver la confiance de leurs populations qui se considèrent déjà comme trahies et livrées à des intérêts étrangers.