Turquie : Malgré la corruption et sa soumission atlantiste, Erdogan remporte les élections municipales.

Malgré les nombreuses et violentes manifestations d’opposition dans les grandes villes, qui ont rassemblé des millions de personnes, malgré les scandales de corruption à répétition à la tête de l’Etat, malgré un surendettement généralisé et l’opposition à l’implication dans la guerre civile en Syrie, le parti du Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, vient de remporter, avec une nette avance, les élections municipales.
Un test de popularité d’autant plus réussi qu’inattendu, pour ce grand démocrate qui n’a de cesse, depuis son accession au pouvoir, de mener une politique répressive et belliqueuse, contre l’opposition. De l’avis des experts, cette victoire va redonner confiance à M. Erdogan qui, sitôt les résultats connus, a promis d’en “faire payer le prix à ses adversaires”.
La première mesure que compte d’ailleurs prendre son gouvernement, ne sera ni sociale, ni économique, mais consistera à renforcer les services de renseignement, au profit de l’appareil d’Etat. Le nouveau projet permet en effet, un accès complet à toutes les données privées et les opérations bancaires, en violation de l’article 20 de la Constitution turque, qui protège la vie privée des citoyens. L’accès à ce type d’informations n’est légalement autorisé, que lorsque la sécurité est en jeu. Une dérive sécuritaire sévèrement contestée, qui risquerait selon ses opposants, de détourner ces services de leur mission d’origine, en les détachant de l’appareil judiciaire et en les munissant d’un pouvoir presque absolu, et de contourner ainsi la séparation des pouvoirs. Un programme commun que l’on retrouve étrangement dans la plupart des pays membres de l’OTAN. Celui de la surveillance accrue des populations et la réduction pour ces derniers, des moyens de contrôle démocratiques.

L’interdiction d’émettre de Youtube et Twitter, pour avoir servi de plateformes de diffusion à des enregistrements confidentiels prouvant l’implication directe de ministres et de l’entourage familial du Premier Ministre, dans des scandales de corruption ou d’opérations de déstabilisation de la Syrie, n’incitent guère à l’optimisme. Notamment des comptes-rendus de conversations téléphoniques piratées, où le chef du gouvernement conseille à son fils de se débarrasser rapidement de plusieurs dizaines de millions d’euros, quelques heures après le premier coup de filet policier. Bien que le tribunal constitutionnel d’Ankara ait ordonné la levée de l’interdiction, la jugeant contraire à la liberté d’expression, Tayyip Erdogan a déclaré qu’il passerait outre, la décision de justice et menace aujourd’hui les réseaux sociaux, de contrôles fiscaux, pour évasion fiscale. La concentration des pouvoirs semble être devenue une obsession du régime d’Erdogan. Sa fonction de Premier ministre cumule dorénavant celles de maire de la capitale, de Ministre de la Justice et de Procureur du Ministère public. Il est donc compréhensible qu’il veuille aussi devenir le chef des services secrets, dont le travail ne pourrait plus être remis en cause devant des tribunaux.
C’est pas mal pour une démocratie ! Il est vrai, que les affrontements violents pendant les élections n’ont causé la mort que de seulement huit personnes.
M. Erdogan, activement soutenu pas les Etats-Unis, autre exemple de démocratie, a reçu les chaudes félicitations de Washington, comme de Tel Aviv. Qui s’en étonnerait ?

En Turquie, comme ailleurs, un vaste réseau maffieux semble avoir pris les rênes de l’Etat et maintient sa population dans l’illusion démocratique et le mirage économique, grâce à l’endettement. Avant l’arrivée au pouvoir de M. Erdogan, le dette turque était de 300 milliards de Dollars. Aujourd’hui, elle est pratiquement à 1 200 milliards de Dollars.
La prospérité économique de la Turquie n’est qu’un leurre. Si ses exportations s’élèvent à 100 milliards, ses importations sont de 200 milliards de Dollars. Et pour masquer le déficit, l’Etat empreinte encore et encore, payant entre 50 et 60 milliards d’intérêts par an.
Avant que l’AKP n’arrive au pouvoir, le pays était un grand producteur agricole, mais les accords passés avec l’Europe, et accélérés par Erdogan, ont tué l’agriculture et l’élevage turcs.
De plus, l’alignement du pays sur la politique étrangère de Washington dans le dossier syrien et surtout trois ans d’échecs et d’enlisement, malgré son soutien direct aux terroristes et son rapprochement avec Israël, mis à part quelques prises de becs médiatiques, isolent progressivement le gouvernement turc.
Ce sont tellement de points communs qu’Ankara partage avec Paris. La seule différence notable est que le parti de M. Erdogan, lui, a remporté les élections municipales. Il a peut-être plus de talent pour mentir à son peuple.