Les manifestations en Bretagne annoncent un mouvement social de grande ampleur qui ne devra rien aux syndicats discrédités

« Trop, c’est trop ! », ou « Ré, zo ré ! » en Breton, semble avoir été le slogan fédérateur de cette foule, toutes catégories sociales confondues, d’agriculteurs, de pêcheurs, d’employeurs, de commerçants et de salariés venus manifester en famille à Quimper. Leur signe de ralliement ? Un bonnet rouge qu’arboraient déjà leurs ancêtres, lorsqu’au 17ème siècle, sous le règne de Louis XIV, ils se révoltèrent contre des impôts de plus en plus lourds à supporter.

Rien ne semble devoir changer sous le beau ciel de France. Rappelez-vous l’histoire passée. Pour financer les guerres et surtout les projets fastueux du monarque, les impôts devinrent de plus en plus lourds accompagnés de mesures de plus en plus impopulaires. Autonome, la Bretagne disposait alors d’un parlement qui permit aux privilégiés de la province de voter ces impôts qui ne les concernaient pas, mais qui en revanche, entraina d’un seul coup, le doublement du poids de l’imposition sur le peuple. Face à l’hostilité, ou à l’incapacité de payer, l’administration se fit de plus en plus oppressive. Des émeutes éclatèrent et une troupe de rebelles menée par Sébastien Le Balp rédigea des codes avec un programme social, légitimé par ce qu’ils appelèrent « la liberté d’Armorique ». Préludes aux revendications et à la révolution de 1789, les bonnets rouges n’étaient pas encore les sans-culottes, mais ils appelaient déjà à l’abolition de la noblesse et au contrôle du clergé par le peuple. La répression fut terrible : des milliers de femmes, enfants, vieillards ou paysans ont été pendus ou déportés aux galères, tandis que la Bretagne était mise à feu et à sang, par les troupes royales.

Autres époques, autres clercs et autres vicaires, mais le fond demeure le même. Des guerres autant coûteuses qu’inutiles, dans un contexte de crise économique internationale, un Etat qui vit bien au-dessus de ses moyens, le tout sur fond de perte de confiance dans une classe politique complètement déconnectée et impuissante, ont mis la France à genoux et les français en colère. L’écotaxe n’est qu’un prétexte pour manifester un ras-le-bol devenu général car derrière cette “démonstration”, il y a des entrepreneurs en faillite, des familles sans emplois et des jeunes sans avenir. Bref, une révolte populaire de français en situations précaires, dans une Bretagne qui ne veut pas mourir. En fait tout un peuple victime des choix politiques et économiques d’un modèle qui, bien qu’il court à la faillite, s’est imposé par la couardise de certains ou les intérêts à court terme d’autres. La mondialisation à la sauce bruxelloise n’a fait qu’en hâter le processus et surtout a légitimé l’impossibilité de mettre en place des mesures de protection, au nom de la sacro-sainte liberté du marché, et de la circulation des hommes et des capitaux. Résultat : le marché s’est déplacé, les capitaux ont fuit et les hommes ont été sacrifiés.

Le droit de « Travailler et vivre en Bretagne » est aussi un des slogans qui aura résonné dans les rues de Quimper. Une juste revendication pour ces héritiers d’une histoire de plus de 2500 ans qu’ils ont su essaimer sur tous les continents, tout en conservant à la Bretagne sa singularité. Quimper est une ville du Finistère. En breton on nomme cette région Penn ar Bed, la « tête du monde ». Un monde européen qui va de Brest à Vladivostok, un territoire bien plus grand que cette Union Européenne qui n’a d’européenne que le nom.

Ce ras-le-bol fiscal général, permet aussi de révéler, la mise sous coupe réglée des pays membres de l’UE, par le système libéral. De plus, le contrat passé sous la précédente majorité avec la société italienne Ecomouv, chargée de collecter l’écotaxe, pourrait, selon certains, établir des soupçons de favoritisme voir de corruption. En effet, en cas d’annulation de ce contrat, l’Etat devra acquitter près de 800 millions d’euros à cette société privée, et la privatisation d’une des fonctions régaliennes qu’est la collecte de l’impôt, ouvre également la porte, à toutes les dérives possibles. Du reste, prendre la décision de ne taxer le transport polluant que sur le territoire français, sans prendre en compte les trajets internationaux, en provenance d’Asie ou d’Amérique, semble d’une stupidité sans nom. Et il n’est donc pas surprenant que cette décision soit ressentie légitimement, par les entrepreneurs qui produisent en France, comme une profonde injustice.

De tout temps, on ne gouverne qu’en fonction de la crainte que l’on inspire ou de la confiance des populations. Or aucun de ces deux critères ne semble aujourd’hui correspondre à la politique des gouvernements successifs qui, de contradictions en reculades, détruisent progressivement l’appareil d’Etat, tout en rognant les libertés publiques. Il est vrai que de maîtres chez eux, Bretons comme Français dépendent dorénavant des décisions prises à Bruxelles, au FMI ou à l’OMC. Car le problème n’est pas que Français ou Breton. Partout en Europe, une caste politico-affairiste endogamique et déconnectée, confirme qu’elle n’entend rien à sa population. Restant sourde à ses appels, cette nouvelle classe sociale s’étonne de la colère du peuple, alors qu’elle est incapable d’apporter le plus petit commencement d’espoir à une population qui se voit lésée, trahie et abandonnée

Le poète Français Victor Hugo déclarait que, je cite : « La Bretagne est une vielle rebelle. Toute les fois qu’elle s’est révoltée pendant deux mille ans, elle avait raison. Contre la Révolution ou contre la Monarchie, contre les représentants de la République ou contre les gouverneurs du Roi, c’est toujours la même guerre qu’a faite la Bretagne », fin de citation. Si le pouvoir se creusait autant la tête, pour faire des économies qu’il le fait pour créer des taxes, la France ne se couvrirait pas de bonnets rouges. Né en Bretagne, il y a fort à parier que dans le contexte actuel, ce mouvement se développe partout en France. Et ce ne sont pas les quelques débordements observés à la fin de la manifestation, qui décrédibiliseront ce rassemblement populaire, comparable à ceux de la Manif pour Tous. Et après les portiques de surveillance, viendra sans doute, le tour des impopulaires radars automatiques. De nouvelles manifestations sont déjà prévues dont celle du 26 janvier 2014, à Paris. Et les équipes de Voix de la Russie et de Prorussia.tv., seront toujours là pour vous informés.