Poussières d’empire, la Hollandie confrontée à ses incohérences en Afrique

Il fallait s’y attendre ! L’actuelle Libye, ou plutôt ce qu’il en reste, appelle encore à l’aide l’Occident. De l’aveu même de son Premier ministre, venu rendre des comptes à Londres, aucun gouvernement n’est en mesure d’assurer un état de droit propice aux investissements. On croyait pourtant que ces peuples, avides de démocratie, seraient touchés par la grâce de la main invisible qui règne sur les marchés. L’instabilité chronique, due à l’éclatement du pays, et le chaos qui règne en raison des innombrables milices armées, menace même la production de pétrole, principale ressource du pays.
Tragique résultat, s’il en est, d’une opération militaire menée, rappelez-vous, au nom de l’ingérence humanitaire et des droits de l’homme.
Envahie il y a deux ans par une communauté internationale, une fois de plus réduite aux acquêts, comprenant les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France, agissant en grande partie aux profits du Qatar, de l’Arabie Saoudite et de multinationales, le pays est aujourd’hui aux mains de fondamentalistes islamiques. Déchiré par des guerres tribales qu’on croyait révolues, la Libye est devenue un foyer de déstabilisation générale du Moyen Orient comme de l’Afrique Centrale.

L’intervention de la France pour protéger ses intérêts au Mali, réalisée au passage en dehors de toute résolution de l’ONU, n’est qu’une des nombreuses conséquences de ce bouleversement régional qu’elle a pourtant contribuée à créer. François Hollande a beau, parader en César victorieux à Bamako, à l’occasion de l’intronisation de « son » nouveau président malien, dès que les soldats français seront repartis, l’instabilité reviendra. Car le problème a été déplacé et non pas résolu. Une opération ne peut être considérée comme réussie, que lorsque les forces ennemies ont été annihilées, ou tout du moins réduites à la portion congrue. Ce qui est loin d’être le cas pour le Mali. Les pays frontaliers comme le Niger, le Nigeria ou le Tchad sont ou seront à leur tour, atteints par la contagion. Comme c’est le cas pour la République Centre-Africaine, qui s’enfonce chaque jour dans un scénario ivoirien, voire libyen, depuis le renversement en mars 2013 du Président Bozizé. Un renversement soutenu par la France, et par des milices armées, dont des groupes islamistes venus du Nord. Un chaos de plus, à mettre au compte de M. Bricolage qui, visiblement frustré de ne pas avoir eu son intervention militaire en Syrie et exclut de la cour des grands, envisage de débarquer en RCA, avec l’aide d’une coalition africaine bien en peine d’y faire régner l’ordre.

Le jeu trouble de la France, ancien gendarme local, devenu le supplétif exalté des intérêts américains, ne camoufle guère cette nouvelle forme de colonisation qui, sous couvert de droit d’ingérence, vise à mettre la main sur les ressources minérales et énergétiques au Moyen-Orient comme en Afrique. Comme la Syrie par rapport à l’Iran, la RCA n’est qu’une étape avant l’objectif final que représente la République Démocratique du Congo. C’est en effet, la cible privilégiée des appétits de l’ogre américain, son sol regorgeant de ressources vitales pour de nombreuses industries occidentales stratégiques, de l’automobile, du domaine spatial, des hautes technologies, de l’électronique et même de la joaillerie. Les pays voisins, comme le Rwanda et l’Ouganda, avides des richesses congolaises, au point de mettre le pays à feu et à sang depuis treize ans, ont le privilège de représenter les intérêts américains au cœur même de l’Afrique. Les conflits ethniques entre Hutus et tutsis qui au début, ont servis de prétexte, ont depuis laissé la place à une véritable épuration pour s’approprier les terres et les ressources principalement basées à l’est. Tout congolais, quelque soit son ethnie, est pourchassé et massacré dans l’indifférence générale des nations occidentales. Des crimes de guerre et contre l’humanité sont régulièrement commis dans un silence assourdissant, comme le viol systématique des femmes devant maris et enfants rassemblés, afin de les traumatiser aussi.

Les médias occidentaux, quand ils ne travestissent pas les faits, sont d’une discrétion de violette, transformant les envahisseurs, en mouvements de rébellion sensés remporter l’adhésion des populations. Comme en Syrie ou ailleurs, les agresseurs bénéficient de la bénédiction et des largesses de Washington et désormais de Paris, en armement et en formation. Malgré l’empilement des preuves et des cadavres, et bien que les rapports de l’ONU les considèrent comme des états génocidaires, le Rwanda, comme l’Ouganda, sont chargés des basses besognes de l’empire. Qu’importent les moyens, le génocide de millions de congolais ne pèse guère dans la balance, aux yeux des démocrates de Washington pour qui, seul le résultat compte.

Malgré l’épisode du Mali, la Hollandie n’a plus les moyens et surtout la volonté de défendre les intérêts et les amitiés de la France en Afrique sans l’aval de Washington. Participant au chaos général, elle aurait pourtant fort à faire, en s’attaquant d’abord à celui qui règne en France et auquel devrait s’occuper en priorité son président par défaut. N’arrivant visiblement pas à distinguer le Zambèze de la Corrèze, le suffisant M. Bricolage semble croire qu’il est plus à sa portée de régler les problèmes de la planète que ceux de la France. Une France qui devrait peut-être s’engager d’abord en France, et aurait tout intérêt à rassembler ses forces et ses vrais amis, au lieu de les dilapider au bénéfice d’autrui.