Réforme territoriale : quand Valls découvre les vertus des patries charnelles, 40 ans après les régionalistes

Ce n’était pas la partie la plus emblématique du discours d’investiture d’Emmanuel Valls, tant les préoccupations des Français sont ailleurs. La réforme du fameux mille-feuille territorial est sans aucun doute en bas du tableau des urgences du quidam moyen, derrière l’emploi, l’insécurité, l’immigration ou encore la santé.
Pourtant ce mille-feuille illustre, à lui tout seul, le mal français. En multipliant les strates, on dilue les responsabilités, on multiplie les financements croisés, les emplois territoriaux et donc la masse des fonctionnaires à la charge des contribuables, sans pour autant diminuer les impôts nationaux ou la masse de la fonction publique d’état. C’est une course en avant, vers l’inefficacité, la corruption et le gaspillage.
Commune, communauté de commune, intercommunalité, commune-canton, canton, pays, arrondissement, département, agglomération, région… La majorité de ces strates ne sont pas élues, mais désignées. Rares sont celles qui représentent des bassins de vie, des communautés ou des identités réelles.

Si les communes et les départements français sont inscrits dans l’histoire de France depuis plus de 200 ans, les autres sont des créations d’une république en perte de vitesse et de légitimité. Même les régions répondent à un schéma technocratique, et rares sont celles qui représentent une communauté identitaire clairement identifiée. La Corse, l’Alsace, la Picardie peuvent répondre à des identités identifiées.
Mais quid, par exemple, de la Normandie ou de la Bretagne ?

La Bretagne a été amputée du département de la Loire-Atlantique dans les années 40. Depuis, les Bretons n’ont eu de cesse de réclamer, plus ou moins calmement, l’intégrité de la Bretagne. Et c’est encore ce qu’ils ont fait, ce samedi 19 avril, dans les rues de Nantes, avec une très forte mobilisation. Une quinzaine de milliers de manifestants, toutes couleurs politiques confondues, drapeaux bretons et bonnets rouges fièrement portés pour pouvoir « vivre, travailler et décider au pays ». Une affirmation d’identité bretonne, que la France ne semble plus en mesure de leur permettre. Pour Christian Troadec, figure de proue des Bonnets rouges et maire DVG de Carhaix, l’ordre du jour est clair : “Aujourd’hui, la France est l’Etat le plus centralisé d’Europe. Il est temps qu’on puisse, nous en Bretagne avec 4 millions et demi d’habitants, […] se retrouver au même niveau que les régions européennes comme les Länder allemands, comme les grandes provinces espagnoles, l’Ecosse, le Pays-de-Galles“.
Longtemps mise au point mort par des potentats locaux, frileux de perdre des postes de président avec moins de conseils à présider, la réforme territoriale est toujours contestée par les ténors locaux, mais elle a désormais un allié de poids, avec un état central qui n’a plus les moyens d’entretenir un telle cours.

Autre quête d’identité, la Normandie. Elle a été divisée en deux demi-régions, la Haute et la Basse Normandie, pour faire deux fiefs sur mesure, à des potentats locaux des années 70 : Jean Lecanuet à Rouen et Michel d’Ornano à Caen. Des régions sans poids administratif, ni économique, au 17 et 18 rang sur 22, dans le classement des régions. Alors que réunie, la Normandie serait  la 5 région de France, d’un poids proche des landers allemands. Face à cette division purement administrative et négationiste, une organisation régionaliste a vu le jour et réclame depuis 40 ans non seulement la réunification de la Normandie, mais une plus grande régionalisation et une simplification du mille-feuilles administratif. Nous sommes en ligne avec son président-fondateur, Didier Patte.

Monsieur Patte, bonjour

Merci de nous accueillir sur vos plateaux de TVNormanChannel, votre chaine de télévision normande. En tant que président d’un mouvement régionaliste normand, présent sur la scène politique depuis 1969, quel regard portez-vous sur la réforme territoriale que vient de proposer Manuels Valls ?

RÉPONSE

Le découpage qui est proposé vous satisfait-il ? Est-ce que pour vous il répond à la nécessité de réduire le mille-feuille administratif français ? Et autre question êtes-vous pour la suppression des départements ?

RÉPONSE

Certains présidents de régions socialistes renâclent déjà à la proposition, et proposent des fusions étonnantes, comme le rattachement de la Picardie à la Haute-Normandie par exemple. Pourquoi selon vous, cette volonté de nier l’histoire, voir même de nier les identités qui composent la France ?

RÉPONSE

Alors d’autres, pour ne pas faire cette réunification normande, soulèvent un problème qui semble secondaire, celui de la capitale de la Grande Normandie. Alors, Rouen ou Caen ?

RÉPONSE

Monsieur Patte, merci.